dimanche 16 février 2014

"Boycotter Israël": menace vaine ou effective ?



Dans le cadre de l’étude de cette question, j’ai été sollicité  de faire un rapport  de mes activités pour essayer de neutraliser le boycott arabe contre Israël alors que j’étais en poste diplomatique à Paris entre 1974 et 1979.
En effet  j’avais, à l’époque, œuvré à convaincre des personnalités politiques et juridiques du besoin d’une législation en France qui neutraliserait le boycott arabe contre Israël. Il en a résulté en fin de compte, grâce au concours professionnel du Prof. D. Ruzié et de feu Maître J.L. Bismuth ainsi qu’au support de nombreux membres de l’A. N. et du Sénat, une première loi "anti-boycott" datant du 7 juin 1977.      

Selon cette loi, le boycott est ,depuis, considéré comme un acte discriminatoire de type économique ( Article 225-1 du Code Pénal) et est sanctionné selon les dispositions de l’ Article 225-2 du Code Pénal prévoyant :  
 « La discrimination définie à l’article 225-1 commise à l’égard d’une personne physique ou morale, est punie de trois ans d’emprisonnement et de 45.000 € d’amende lorsqu’elle consiste :
1° A refuser la fourniture d’un bien ou d’un service,
2° A entraver l’exercice normal d’une activité économique quelconque…
Lorsque le refus discriminatoire prévu au 1° est commis dans un lieu accueillant du public ou aux fins d’en interdire l’accès, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75.000 € d’amende »
 Cette loi avait eu comme premier résultat d’empêcher  la Coface (Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur) de garantir les exportateurs qui, se soumettaient au boycott arabe visant Israël qui interdisait de commercer avec lui ou d’utiliser des technologies israéliennes, ou encore pour la raison que  des juifs siègent dans leur conseil d’administration.

Raymond Barre, alors premier ministre, voulant annuler cette loi,  signa au Journal officiel une directive  ôtant toute efficacité à ces dispositions. Selon lui l’objectif fondamental  de réduction du déficit commercial français avec les pays du Moyen-Orient devait primer sur tous les autres principes. L’économie française  devait avoir priorité sur  la liberté économique d’Israël.
Il  se vit alors attaqué par des organisations juives, par la Ligue des droits de l’homme, ainsi que par le Mouvement pour la liberté du commerce.
Mais Raymond Barre ne voulait pas en démordre et l’affaire fut déférée au Conseil d’Etat, lequel annula en avril 1980 "l’avis Barre" pour illégalité, notamment parce qu’il violait le principe de non discrimination dans le commerce inscrit à l’article 7 du Traité de Rome.

Depuis, l’appel au boycott, quelque soit son support, devint en France, une infraction également au regard de l’article 24 al.8 de la loi du 30 décembre 2004 qui avait  modifié la loi du 29 juillet 1881 (elle même découlant de celle du 7 juin 1977 citée plus haut). Le boycott d’Israël et de sa production y tombe donc sous le coup de toute cette Législation.
Cela a permis aux tribunaux de condamner tous les appels au boycott y compris la diffusion de films sur Internet, des affichettes ou du port de vêtement avec inscription,"Boycott Israël".

Cette législation a été surtout mise à l’épreuve concrètement, depuis 2003 alors que commençait à s’étendre cette fameuse campagne BDS (Boycott, Désinvestissements, Sanctions) contre Israël  et a permis entre autres de rendre les jugements suivants :

- L’affaire la plus célèbre et la plus importante est celle du Maire de Seclin, Jean-Claude Willem, qui avait décidé de boycotter les produits alimentaires israéliens des cantines de sa ville, pour protester contre la politique du gouvernement d’Ariel Sharon envers les Palestiniens, en invoquant sa liberté d’expression.
Le Tribunal Correctionnel lui avait donné raison mais la Cour d’Appel et la Cour de Cassation ont fait valoir qu’il s’agissait d’une discrimination selon les articles de lois anti boycott précités :
Mécontent de cette décision, M. Willem a saisi la Cour Européenne des Droits de l’Homme, qui le 16 juillet 2009, a rendu un arrêt de principe  confirmant la discrimination illégale du comportement du Maire :

- En 2007, le premier arrêt concernant une entreprise commerciale israélienne victime de boycott en France a été rendu en confirmant l’illégalité de la discrimination :

- Le premier procès concernant une activiste, personne physique qui participait à une action de boycott dans un supermarché a eu lieu le 10 février 2010, au cours duquel Mme Arnaud militante de la Ligue des Droits de l’Homme, a été reconnue coupable de discrimination.

- Le 12 novembre 2010, le premier procès concernant la diffusion de vidéos sur Internet d’actions de boycott dans des supermarchés a eu lieu à Créteil. Le jugement mentionnant leur illégalité  a été  rendu le 7 janvier 2011.

- Le 24 janvier 2011 à Perpignan et le 10 février 2011 à Mulhouse, deux importants procès ont eu lieu contre des boycotteurs, dont des responsables locaux de partis politiques,lesquels ont été condamnés pour discrimination illégale.

- Le 17 mars 2011, un procès similaire à celui de Créteil a eu lieu à Bobigny, impliquant en plus le délit de port de T-shirts mentionnant l’inscription « Boycott Israël ». L’un des prévenus était une pro palestinienne, Mme Zemor  qui sera également poursuivie à Paris le 17 juin 2011 pour les mêmes faits.

- Enfin relaxés en première instance, douze militants de la région mulhousienne qui avaient incité des consommateurs à boycotter les produits d’Israël ont été condamnés le 27 novembre 2013.

Il semble donc que cette menace du "boycott d’Israël" qu’on évoque actuellement dans le contexte d’un éventuel échec des pourparlers en cours avec les Palestiniens, semble bien vaine et peu effective.
Cela d’autant plus que nombreux sont les pays qui ne sont pas prêts à renoncer au partenariat avec l’attrayante économique d’Israël et sa technologique de pointe.

Z.T. 
 
 
Dr Zvi Tenney
Ambassador of Israel (ret)
www.zvitenney.info
 

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